Page:Rolland Clerambault.djvu/359

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Et Clerambault, sans y penser, récita les paroles d’Isaïe, qui lui montaient à la mémoire :

— « Les ténèbres couvrent la terre.
L’ombre enveloppe les peuples… »

Il s’était arrêté. Mais, de son lit à peine éclairé, Froment invisible continua :

— « Lève-toi, car sur la cime des monts
La Lumière vient… »

— Elle vient, répéta dans l’ombre la voix de Mme Froment, assise au pied du lit à côté de Clerambault. Clerambault lui saisit la main. Ce fut comme un frisson d’eau qui passa par la chambre.

— Pourquoi dites-vous cela ? demanda le comte de Coulanges.

— Parce que je le vois.

— Je le vois aussi, dit Clerambault.

Le docteur Verrier lui demanda :

— Qui ?

Mais avant que la réponse eût été prononcée, tous savaient déjà le mot qui allait être dit :

— Celui qui porte la Lumière… Le Dieu qui vaincra.

— Attendre un Dieu ! fit le vieil helléniste. Vous croyez au miracle ?

— Le miracle, c’est nous. N’est-ce pas un miracle que, dans ce monde de perpétuelle violence, nous gardions la foi perpétuelle en l’amour et l’union des hommes ?

Coulanges dit âprement :

— On attend le Christ pendant des siècles. Quand il vient, on l’ignore et on le crucifie. Ensuite, il est ou-