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Page:Rolland Handel.djvu/152

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Hændel n’était pas un artiste renfermé en lui-même ; il regardait, il écoutait, il observait ; la vue fut pour lui une source d’inspiration, à peine moins importante que l’ouïe. Je ne connais pas de grand musicien allemand qui ait été, autant que lui, un « visuel » ; comme Hasse et comme Corelli, il avait la passion des beaux tableaux ; il ne sortait guère de chez lui que pour se rendre au théâtre, ou à des ventes de tableaux ; il était connaisseur, et s’était fait une collection où l’on trouva, à sa mort, des Rembrandt[1]. On a remarqué que sa cécité, qui aurait surexcité la création d’un pur « auditif », concentré dans ses rêves sonores, le paralysa tout aussitôt, en tarissant la source principale de son renouvellement.

Ainsi, gonflé de toute la sève musicale de l’Europe de son temps, imprégné de la musique des musiciens et de la musique plus riche qui flotte dans la nature, qui est partout diffuse dans l’ombre et la lumière, — ce chant des sources, des forêts, des oiseaux, dont ses œuvres sont pleines, et qui lui a inspiré tant de pages pittoresques, d’une couleur à demi-romantique[2], —

  1. La passion du collectionneur augmenta avec l’âge et avec la fortune. Une lettre de 1750 nous le montre achetant de beaux tableaux, dont un grand Rembrandt. C’était un an avant que la cécité vînt le frapper.
  2. Depuis les « Hauts tilleuls » d’Almira jusqu’au chœur de la nuit, de Salomon.