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130 LES ORIGINES DU THÉÂTRE LYRIQUE MODERNE.

habile, non seulement d'airs entiers, mais de demi-airs (1), qui tiennent le milieu entre la mélodie et la déclamation , et mènent de l'une à l'autre. Un peu froid d'invention , mais doué de beau- coup de goût et d'intelligence, il est moins remarquable par la nouveauté de ses motifs musicaux, que par la grâce piquante de leurs agencements harmoniques. Son récitatif est aussi traité avec vérité et avec une certaine grandeur. Il s'occupait en même temps de perfectionner le matériel de la musique, et surtout son écriture (2).

Il aborda le théâtre avec un S. Abondio prête, oratorio perdu, et la Catena d'Adone, représentée à Rome en 1626. A défaut du pur sentiment chrétien, ou du moins religieux, difficile à rencontrer de son temps, on trouve dans le poème d'Ottavio Tronsarelli (3), un peu de ce grand symbolisme néoplatonicien, cher aux artistes romains, et qui a sa plus haute expression dans YEcole d'Athènes. On y voit que le symbolisme musical n'est pas une invention de l'auteur du Tannhaùser. Les sujets ont quelque rapport; mais, comme il fallait s'y attendre, le plus païen des deux ouvrages est de l'homme qui l'était le moins. Jamais un Romain, fût-il le plus dévot des musiciens de la Sixtine, n'eût consenti à faire jouer à Vénus le rôle de séduction perverse que lui prêtent les gens du Nord. Dans la Catena d'Adone, ce rôle passe à une magicienne,

��(1) « Vi sono molt' altre mezz' Arie sparse per l'Opéra , che rompono il tedio del recitativo. » (Catena d'Adone.)

Mazzocchi ne cachait pas du reste sa préférence pour l'ancien genre de musique :

« Il più ingegnoso studio, che habbia la Musica, è quello de' Madrigali; ma pochi hoggidi se ne compongono, e meno se ne cantano, vedendosi per Coro disavventura dall' Accademie poco men che banditi. » (Dédicace des Madrigali a 5 voci.)

Il compose d'ailleurs des madrigaux à 5 voix, en 1638, quand l'opéra réci- tatif a partout triomphé.

(2) Il a inventé, ou consacré, les signes du dièze et double diôze (4+ X)> du crescendo et decrescendo « », de l'augmentation ou de la diminution de l'intensité des sons (V. C), etc. Presque toutes ses préfaces sont consacrées à des remarques ou des inventions de ce genre; en particulier celles des madrigali a 5 voci, de 1638, des Dialoghi e Sonetti, de 1638, et de la Catena d'Adone.

(3) Ottavio Tronsarelli publia en 1632 trente-trois « drammi musicali » (Rome, Corbelletti). Mais il n'est question d'exécution théâtrale que pour le Giudizio di Venere, « uno scherzo », « rappresentato di notte alla presenza di nobilissime dame, » et pour la Sirena, « una cantata » , « nelle augustis- sime nozze del principe D. Taddeo Barberini con d. Anna Colonna, » c'est- à-dire en 1629. La Catena d'Adone a donc la priorité.

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