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la vie de Michel-Ange

Come puo esser, ch’io non sia plu mio ?
O Dio, o Dio, o Dio !
Chi m’ ha tolto a me stesso,
Ch’ à me fusse piu presso
O più di me potessi, che poss’ io ?
O Dio, o Dio, o Dio ![1]

De Bologne, sur le dos d’une lettre de décembre 1507, ce sonnet juvénile, dont la préciosité sensuelle évoque une vision de Botticelli :

Claire et de fleurs bien sertie, qu’elle est heureuse la couronne sur sa chevelure d’or ! Comme les fleurs se pressent à l’envi sur son front, à qui sera la première à le baiser ! La robe qui enserre sa poitrine et s’épand au-dessous est heureuse, tout le jour. Le tissu d’or n’est jamais las de frôler ses joues et son cou. Plus précieuse est encore la fortune du ruban liséré d’or, qui touche doucement d’une pression légère le sein qu’il enveloppe. La ceinture semble dire : « Je veux toujours l’étreindre… » Ah !… Et que feraient donc mes bras ![2]

Dans une longue poésie d’un caractère intime, — une sorte de confession,[3] qu’il est difficile de citer exactement, — Michel-Ange décrit, avec une crudité singulière d’expressions, ses angoisses d’amour :

Quand je reste un jour sans te voir, je ne puis trouver de paix nulle part. Quand je le vois, tu es pour moi comme la nourriture pour celui qui est affamé… Quand tu me souris, ou quand tu me salues dans la rue, je prends feu comme la poudre… Quand tu me parles, je rougis, je perds la voix, et soudain mon grand désir s’éteint…[4]

  1. Poésies, VI.
  2. Ibid., VII. Voir aux Annexes, IV.
  3. L’expression est de Frey, qui date la poésie, sans raison sufïisante, à mon sens, de 1531–32. Elle me semble beaucoup plus jeune.
  4. Poésies, XXXVI. Voir aux Annexes, V.
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