Pendant l’année 1694 il peint trente-sept portraits originaux et en outre fait exécuter dans son atelier vingt-quatre copies de ses œuvres antérieures.
Sa réputation est devenue européenne ; les étrangers de distinction qui visitent Paris s’estiment favorisés quand ils peuvent emporter un portrait de sa main ; les ambassadeurs d’Angleterre, d’Autriche, de Portugal, d’Espagne, de Hollande, de Suède, de Pologne, de Gènes, de Brunswick, sont ses clients, ainsi que le nonce du pape ; les jeunes princes amenés en France pour compléter leur éducation et prendre l’air de la cour, lui commandent leur portrait et celui de leur précepteur.
A côté de cette clientèle cosmopolite nous trouvons une opulente clientèle française composée de ducs et pairs, de maréchaux de France, de la plupart des membres de la famille royale, de présidents au parlement et des fermiers généraux. Il peint le Dauphin, le duc de Bourgogne, le roi d’Espagne, le prince de Conti, élu roi de Pologne, les ducs d’Orléans et en 1701 une deuxième fois Louis XIV. Ce second portrait du roi en costume d’apparat, que l’on peut voir au musée du Louvre, obtient un éclatant succès et il en est fait, ainsi que de celui de Philippe V, roi d’Espagne, des centaines de copies.
Jusqu’en 1715, époque où il peignit Louis XV enfant, Rigaud se livra à ce labeur incessant, mais à partir de cette date, il peint beaucoup moins. Riche, sans enfants, il choisit désormais ses modèles, refuse des commandes et ne travaille plus qu’à son heure. Il peint cependant jusqu’à son dernier jour, c’est-à-dire jusqu’à 83 ans, sans témoigner de défaillance et sans que sa renommée ait subi aucune atteinte.
Rigaud est le peintre qui représente le plus fidèlement le siècle de Louis XIV, non seulement par la majesté des attitudes et la richesse des accessoires et des draperies dont il entoure les personnages qu’il peint, mais aussi par le nombre et la variété des hommes considérables qui lui ont servi de modèles. Il a peint six rois, trente-six princes français ou étrangers, vingt-un maréchaux, dix-huit ducs, sept premiers présidents de cours