Page:Ronchaud - Le Filleul de la mort, 1880.djvu/48

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« Tout beau qu’il est, pour plus d’une raison,
Votre métier, Seigneur, ne me plaît guère,
Et j’ai juré que d’un homme de guerre
Mon fils jamais ne serait le filleul.
Outre les gens qu’il met dans le linceul,
Et sans parler ni du sang ni des larmes,
Plus d’un reproche est au métier des armes :
L’injustice est dans votre droit commun.
Or de parrain, pour mon fils, j’en veux un
Juste avant tout. — Voyez donc ce beau sire
Qui fait ici l’insolent avec moi !
Par le sang-Dieu ! de mes yeux ôte-toi,
Dit le soudard, et vite, ou bien je tire,
Pour te punir, ce sabre, par ma foi !… »
Thibaut deux fois ne se le fit pas dire.

Comme il allait poursuivant son chemin,
Marchant toujours, de l’aube au crépuscule,
Il vit venir, son bréviaire en main,
Un gros abbé, monté sur une mule,
Qui cheminait vers le couvent prochain,
Et trottait l’amble, en vrai prélat romain.
Onc on ne vit figure si placide.
Vrai fils du cloître, à l’ombre épanoui,
Il promenait partout autour de lui
Son gros œil bleu, plein d’un orgueil timide,