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DES ODES.

Contrainte d’vn chault deſir,
Ny ſoubs l’eau ny par les nues
N’eſteint les flames venues
Aux cœurs inclins au plaiſir.
La charrette vagabonde
Qui court ſur le doz de l’onde,
Oiſiue au port parauant,
Laſchant aux voiles les brides
Va par les plaines humides
De l’Occident au Leuant.
Du Printemps la ſaiſon belle,
Quand la terre eſtoit nouuelle,
L’an paiſible conduiſoit :
Du Soleil qui nous eſclaire
La lampe eternelle & claire
Tiede par tout reluiſoit.
Mais la main des Dieux ialouſe
N’endura que telle chouſe
Suiuiſt ſon train couſtumier,
Ains changeant le premier viure,
Fiſt vne ſaiſon de cuiure
En lieu du bel or premier.
Lors la Vere donna place
Au chaud, au vent, à la glace,
Qui renaiſſent à leur tour,
Et le ſapin des valées
Vit deſur les eaux ſalées
Renaiſtre & mourir le iour.
On ouyt ſonner les armes ;
On ouyt par les alarmes
Rompre harnois & couteaux,
Et les lames acerées

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