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Page:Ronsard - Œuvres, Buon, 1587, tome 2.djvu/78

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I. LIVRE

Par la Nature endoctriné
Se haſte de rauir le prix :
Mais ces farceurs qui ont appris
Auec trauail peines & ruſes,
A leur honte enfantent des vers,
Qui touſiours courent de trauers
Outre la carriere des Muſes.
Comparez à nos chants nouueaux,
Sont faits ſemblables aux corbeaux
Qui deſſous les fueilles caquettent
Contre deux Aigles, qui aguettent
Aupres du throne de leur Roy,
Le temps de ruer leurs tempeſtes
Deſſus les miſerables teſtes
De ces criars palles d’effroy,

Antiſtro.

» Voyans l’Aigle : mais ny les ans
» Ny l’audace des vents nuiſans,
» Ny la dent des pluyes qui mord,
» Ne donne aux vers doctes la mort.
Par eux la Parque eſt deuancée,
Ils fuyent l’eternelle nuit,
Touſiours fleuriſſant par le fruit
Que la Muſe ente en leur penſée :
Le temps qui les ſuit de bien loin,
En eſt aux peuples le teſmoin.
Mais quoy ? la Muſe babillarde
L’honneur d’vn chacun ne regarde,
Animant ores ceſtui-ci,
Et ores ces deux-là : car elle
Des hauts Dieux la fille eternelle
Ne ſe valette pas ainſi.