Page:Ronsard - Les Amours, 1553.djvu/81

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Il est bien vrai, que ma langueur desire,
Qu’avec le tans je me puisse guerir :
Mais je ne veux ma dame requerir
Pour ma santé : tant me plaist mon martire.

Tai toi langueur, je sen venir le jour,
Que ma maistresse, apres si long sejour,
Voiant le soin, qui ronge ma pensée,

Toute une nuit, folatrement m’aiant
Entre ses bras, prodigue, ira paiant
Les interés de ma peine avancée.

Amour me tue.) Il reçoit tant de mal en aimant, qu’il en meurt: & prend toutefois tant de plaisir en son torment qu’il ne veut point demander secours, ains atendre, qu’a la fin sa dame, de son bon gré, le recompense. Ira paiant, paiera. Cette maniere de parler est commune aux Grecs & aus Francois, comme enseigne Budé aus Commentaires de la langue Greque.


Je veus mourir pour tes beautés, Maistresse,
Pour ce bel oeil, qui me prit à son hain,
Pour ce dous ris, pour ce baiser tout plein
D’ambre, & de musq, baiser d’une Deesse.

Je veus mourir pour cette blonde tresse,
Pour l’embonpoint de ce trop chaste sein,
Pour la rigueur de cette douce main,
Qui tout d’un coup me guerit & me blesse.

Je veus mourir pour le brun de ce teint,
Pour ce maintien, qui, divin, me contreint
De trop aimer: mais par sus toute chose,