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travail d’abstraction cl d’idéalisation, envahit la scène et, parmi tous ces héros vivant et vivant d’une vie si particulière, il convient qu’il soit, à son tour, traité d’après nature. Les généraux veulent qu’on fasse, avec le leur, le portrait de la bête qui les a portés au feu. Les montures des Mamelucks ou des escadrons Russes demandent à être individualisées.

. Ainsi, sur la toile, paysages locaux, costumes multicolores, types nouveaux et variés, chevaux de races diverses, remplacent les héros nus qui se mouvaient dans leur décor classique.

R . n’est pas jusqu’à la composition dont les lois ne se trouvent contrariées. L’artiste n’est plus le maître de grouper scs personnages à sa guise. S il peint une cérémonie officielle, avec les costumes, le cadre de la cérémonie, la place de ceux qui y figuraient lui sont imposés. L’étiquette, le protocole règlent leur altitude et leur geste, mesurent entre eux les distances, déterminent le point de vue de la scène. Qu’il s’agisse d’une bataille, l’ordre du jour qui la relate est un procès-verbal précis aux indications duquel l’artiste se conforme, obligé de concilier l’art avec la stratégie et aussi avec la vanité du maître qui réclame toujours le premier rang. Toutes ces difficultés imprévues forcent le peintre à l’ingéniosité, et chaque tableau devient un problème dont on 11 e peut, à 1 avance, prévoir la solution. .

Tous les artistes ont, tour à tour, abordé ces matières qu’ils n étaient pas préparés à traiter. Les plus étrangers, les plus réfractaires, ont subi cette loi. Prudhon quitte Psyché pour peindre Y Entrevue des deux Empereurs (l), et Guérin ferme ses chers classiques pour rappeler la Clémence de Bonaparte envers les révoltés du Caire.

Dans cette épreuve nouvelle, ils restent plus ou moins gênés. Quelques-uns ne parviennent pas à oublier leur éducation. Sous des costumes exacts et péniblement copiés, ce sont toujours des Grecs qu’ils nous offrent. Us 11 e savent pas poser leurs personnages, surtout ils ignorent l’art de les animer ; les gestes resl oit lourds et gauches, tendus surtout : ce sont des statues habillées (2). L< s plus habiles n’échappent pas à ce défaut : on pourrait les relever dans la Révolté du Caire de Girôdet (3), et, dans les Aigles même de David, le groupe des officiers, qui s’élance vers le trône, trahit, par sa raideur, sa dislocation violente, 1 inexpérience ou l’éducation trop profondément différente du peintre des Moi aces. David est pourtant de tous les artistes, si l’on en excepte Gros, celui qui a tiré le meilleur parti de semblables sujets et c’est par eux qu’il doit, presque uniquement, d’avoir conservé, jusqu’à nous, une partie de sa gloire. Aujourd hui qu’il est oublié, en tant que chef d’école, c’est l’auteur du Sacre et des Aigles (1) Au Louvre, sous le n<> 7-48.

(2) Ainsi, de Boisfrcmond, Clémence de Napoléon, au musée d’Amiens (sous le n° 4d|, rtc. (Il) A Versailles.