Page:Rosier - Histoire de la Suisse, 1904.djvu/17

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
15
ALAMANS, BURGONDES ET FRANCS

Les Alamans s’emparèrent des terres et réduisirent les anciens habitants à la servitude. Ils introduisirent leur langue, c’est-à-dire l’allemand ; ils donnèrent des noms allemands aux montagnes, aux rivières et aux localités. Dans la région où ils s’établirent, le latin, la langue des Romains, disparut. C’est pour cela qu’aujourd’hui on parle allemand dans la Suisse du nord et du nord-est et dans la Suisse centrale. Les Alamans détestaient les villes ; ils préféraient vivre dans les grandes fermes isolées et dans les villages. Leurs maisons étaient en bois et couvertes de chaume. Ils aimaient la guerre, la chasse et l’élevage des troupeaux. Les métaux précieux étaient rares. Le bétail servait de monnaie. Pour cinq francs de notre monnaie, on pouvait alors avoir une belle vache ; pour dix francs, un bœuf. À la tête du peuple était placé un duc, qui commandait l’armée. Mais, pour les choses importantes, les hommes capables de porter les armes se réunissaient en assemblées populaires et prenaient les décisions.

Les Burgondes occupèrent la Suisse occidentale. Ils étaient grands et forts ; les hommes hauts de deux mètres n’étaient pas rares chez eux. Ce sont eux qui ont introduit la race de bétail, appelée race tachetée ou race du Simmenthal, qui est très répandue dans nos contrées. Leur royaume s’étendait très loin vers l’ouest et le sud, jusqu’à la Loire et à la France méridionale. Genève fut l’une des capitales de cet État. Les Burgondes étaient plus civilisés que les Alamans. Ils laissèrent un tiers des terres aux anciens habitants. Peu à peu ils se fondirent avec eux et adoptèrent leurs mœurs et leur langue. Mais le latin se transforma. Avec le temps, il donna naissance à la langue française. C’est ainsi que le français devint la langue de la Suisse occidentale. Le roi Gondebaud fit beaucoup pour établir de bons rapports entre les Burgondes et les anciens habitants. La loi qu’il donna à son peuple a gardé son nom ; on l’appelle la loi gombette. Elle était très douce pour l’époque.

Grâce à leurs hautes montagnes, les Rhètes des Grisons furent à l’abri des invasions. Ils ne se mélangèrent pas avec les Germains et gardèrent leur langue. Cette langue, qui vient du latin, s’appelle le romanche. Elle est encore parlée dans une partie des Grisons.

La vallée du Tessin resta en dehors des territoires occupés par les Alamans et les Burgondes. Elle subit le sort de l’Italie et l’italien devint la langue de ses habitants.


7me LECTURE

Bienfaits du christianisme. — C’est sous la domination des Francs que le christianisme s’établit définitivement en Suisse. Le chef suprême de l’Église était le pape de Rome. Au-dessous de lui étaient placés les évêques. À leur tour, les évêques dirigeaient les prêtres et les moines. Dans la Suisse occidentale, il y avait trois évêques, ceux de Genève, de Lausanne et de Sion ; dans le reste du pays, ceux de Bâle, de Constance et de Coire. Parmi les évêques de cette époque lointaine, on cite Marius ou Saint-Maire, évêque de Lausanne. Il a écrit l’histoire de son temps. Pour se reposer de ses travaux, il cultivait les champs de ses mains et sculptait des vases de bois pour le culte.

L’Helvétie avait été dévastée par les invasions des peuples germaniques. Une fois fixés, les envahisseurs avaient recommencé à cultiver le sol. Mais ce travail était long. Une grande partie du pays restait couverte de forêts et de marécages. Bien des vallées aujourd’hui très peuplées étaient alors sauvages et complètement inhabitées.

Ces lieux déserts étaient justement ceux où les ermites et les moines aimaient à s’établir. Cherchant la solitude, ils se retiraient loin des hommes, au milieu des bois et des broussailles. Ils y bâtissaient quelques cabanes et une petite chapelle. Ils abattaient les arbres et se mettaient à cultiver la terre. Un monastère était fondé. Les moines construisaient un moulin, des greniers, une boulangerie ; ils fabriquaient des vêtements et des meubles.

Couvent et bourg de Disentis.

Fig. 31. — Couvent et bourg de Disentis.
(Le couvent est situé à gauche, dominant le bourg. Il fut fondé dans la sauvage vallée du Rhin antérieur par un disciple de Colomban.)