Page:Rosny - La Guerre du feu.djvu/87

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— Ceux-là, fit Naoh, après les avoir considérés avec attention, sont plus faciles à surprendre… Nam et Gaw ont chassé les chacals ; le fils du Léopard va chasser à son tour.

Il descendit du mamelon, emportant la peau d’un des chacals, et disparut dans les broussailles qui croissaient vers le couchant. D’abord, il s’éloigna des Dévoreurs d’Hommes, afin de ne pas se découvrir. Il traversa la broussaille, rampa parmi les hautes herbes, longea une mare ombragée de roseaux et d’oseraies, tourna parmi des tilleuls, et se trouva finalement à quatre cents coudées du Feu, dans un buisson.

Les veilleurs n’avaient pas bougé. À peine si l’un d’eux perçut l’odeur du chacal, qui ne pouvait lui inspirer aucune inquiétude. Et Naoh se remplit les yeux de tous les détails du campement. Il mesura d’abord le nombre et la structure des guerriers. Presque tous décelaient une musculature imposante : des bustes profonds, servis par des bras longs et des jambes courtes ; l’Oulhamr songea qu’aucun ne le devancerait à la course. Ensuite, il examina la figure du sol. Un espace vide, où la terre était rase, le séparait, à droite, d’un petit tertre. Après, il y avait quelques arbustes, puis un banc d’herbes hautes qui tournait vers la gauche. Cette herbe s’allongeait en une sorte de promontoire jusqu’à cinq ou six coudées du Feu.

Naoh n’hésita pas longtemps. Comme les veilleurs lui tournaient presque le dos, il rampa vers le tertre. Il ne pouvait se hâter. À chaque mouvement des veilleurs, il s’arrêtait, il s’aplatissait comme un reptile. Il sentait sur lui, comme des mains subtiles, la double lueur du brasier et de la lune. Enfin il se trouva à l’abri et, se coulant derrière les arbustes, traversant la bande herbue, il parvint près du Feu.