Page:Rosny aîné - La Jeune vampire, 1920.djvu/18

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
18
LA JEUNE VAMPIRE

indifférente. Dès qu’elle distingua Bluewinkle, ses lèvres frémirent, on l’entendit chuchoter :

— Darling !

— Bother the man ! [1] grommelait tout bas Coleman. Il l’agite… il l’agite trop !… On devrait pouvoir le visser dans une cellule pendant vingt-quatre heures… Qu’est-ce que je disais !

Les paupières d’Evelyn s’étaient refermées ; un pli douloureux se creusait entre les sourcils ; puis, le souffle parut se ralentir.

— Du sang ! C’est du sang qu’il lui faut ! Je parierais mille livres contre une guinée, continuait à soliloquer le neurologiste.

Et, s’adressant au colosse :

— David, mon camarade, ôtez ce veston et retroussez une manche de votre chemise…

L’autre obéit avec calme et méthode, mais alors Percy fut saisi d’un doute. Fallait-il injecter du sang à la malade ? Ou fallait-il qu’elle puisât d’emblée à la source ?… En soi, l’injection paraissait préférable ; mais, dans les cas exceptionnels, Coleman avait pour principe de rejeter la logique et de s’en tenir strictement à la méthode qui a fait ses preuves. Or, Evelyn n’avait jamais absorbé le sang indirectement… Il remit en place la seringue qu’il venait d’aveindre, examina le bras du jeune David et appliqua lui-même les lèvres d’Evelyn à l’endroit qu’il jugea le plus favorable.

L’effet fut prodigieux. Instantanément, les paupières se rouvrirent, les pupilles s’animèrent, puis l’on vit s’accélérer le souffle. Une minute à peine s’était écoulée, et déjà on avait l’impression que l’énergie rentrait à flots dans l’organisme épuisé…

Cependant, James Bluewinkle s’était glissé auprès du lit. D’abord, une joie ardente parut sur son visage. Mais, à

  1. Intraduisible. À peu près : Foin de l’homme !