Page:Rosny aîné - La Jeune vampire, 1920.djvu/46

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
46
LA JEUNE VAMPIRE

formisme, peut-être aussi parce qu’il sentait que sa chance d’être aimé par Evelyn en dépendait.

Leur intimité se consolidait. Un matin qu’il lui avait dit des paroles tendres, Evelyn répondit :

— Mais vous savez que je ne me considère pas comme votre femme. Comment faire pour nous marier ?

Il tâcha de la raisonner. Il lui montra qu’ils étaient mariés devant les hommes et que, par suite, il suffisait de leur consentement mutuel pour que ce mariage devînt réel et irréprochable. Elle ne se rendit pas ; elle avait maladivement besoin d’une sanction.

James se tortura l’esprit pour résoudre ce problème bizarre et irritant. Il songea d’abord à un divorce, suivi d’un nouveau mariage. Mais cette solution exigerait des mensonges auxquels Evelyn ne se serait jamais résolue et qui répugnaient aussi au jeune homme.

À force de réfléchir, il lui vint une idée :

— Ne suffirait-il pas, dit-il, qu’un prêtre confirme notre mariage ?

— Oui, répondit-elle, cela suffirait.

Alors, James alla trouver le « vicar » de Saint-Georges, vis-à-vis duquel il se résigna à farder la vérité. Homme peu subtil, le vicar comprit qu’il s’agissait d’une femme excentrique et qui avait la maladie du scrupule. C’était un clergyman surnourri, que les besoins temporels du culte inclinaient à l’indulgence.

— Nous ne devons pas juger légèrement le prochain ; dit-il. Le scrupule est propre aux âmes d’élite. Ce que vous me demandez n’est pas positivement prévu… mais ce n’est pas défendu… Les frais, naturellement…

Il toussa en épiant Bluewinkle.

— Les frais ne sont pas une objection ! répondit paisiblement le jeune homme.

Et cette riposte ayant une vertu décisive, Evelyn et Bluewinkle parurent devant le vicar de Saint-Georges qui