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LA MÈRE


Louis Ramières déposa sa fourchette et cessa de manger. Il avait l’air dur et maussade ; un grand pli creusait son front lisse. C’était un joli jeune homme par la chevelure bien plantée, l’œil taillé avec art, les joues fines et la structure correcte. Sa mère le considérait avec crainte et admiration. D’avoir de tout temps souffert pour lui et par lui, elle l’aimait davantage. Et elle mettait en lui son orgueil, son espérance, tout le présent et tout l’avenir.

Pour la troisième fois, elle l’interrogeait. Il se décida à répondre :

— Il vaudrait mieux n’en pas parler, puisque nous ne pouvons qu’en souffrir l’un et l’autre. Enfin, puisque tu le veux. J’ai vu tantôt, au cercle, le père d’Hélène. Il sait, bien entendu, que j’aime sa fille, ce qui n’est rien… Mais il sait aussi qu’elle m’aime. Alors, il m’a parlé très franchement. Il me la donnerait si j’apportais deux cent cinquante mille francs, qui constitueraient une part d’as-