Aller au contenu

Page:Rosny aîné - La Mort de la Terre - Contes, Plon, 1912.djvu/189

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
175
LA BATAILLE

— Vous négligez l’effet moral ! fit amèrement le généralissime… La retraite ressemblera inévitablement à un échec…

— Sans doute, murmura Zriny, et c’est ma seule inquiétude. Mais peut-on mettre en balance des inquiétudes, même fortes, avec une catastrophe inévitable ?

Il y eut un silence. Tous les membres de l’état-major, même les plus optimistes, étaient assombris par la déclaration du comte, que chacun tenait pour un soldat habile et pour un homme intraitable sur le point de l’honneur. Si celui-là conseillait la retraite, c’est que vraiment il y avait de bonnes raisons pour la faire !…

Au moment où le généralissime allait reprendre la parole, on frappa à la porte de la salle où se tenait le Conseil.

Eberhardt fronça les sourcils et dit :

— Il y a probablement des nouvelles, messieurs.

Par la porte ouverte, on vit se profiler deux silhouettes. Celle d’un chef d’aérostation et celle d’un homme vêtu en civil, en qui le général reconnut M. Delestang, délégué de l’Institut Becquerel-Curie. Eberhardt n’avait accueilli le savant et ses collaborateurs qu’avec une extrême méfiance et une sorte d’antipathie. Il n’avait aucune foi dans les « rats de laboratoire » ; il tenait que l’armée seule devait s’occuper des choses militaires, qu’il s’agît d’engins, de substances ou de méthodes.