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CONTES. — PREMIÈRE SÉRIE

Il avait fallu l’expresse recommandation de l’empereur et du ministre de la Guerre pour qu’il aidât M. Delestang dans sa mission.

Ce soir cependant, préoccupé de la responsabilité terrible qu’il allait devoir assumer devant son pays et devant l’histoire, il eut comme un vague élan d’espérance à la vue de l’inventeur. Le rapport du chef d’aérostation augmenta cette disposition. On annonçait en effet que l’extrême droite turque avait dessiné un mouvement en avant. Chacun comprit l’importance de cette nouvelle et les visages se couvrirent d’ombre. Quant à Eberhardt, après avoir congédié l’aérostatier, il se tourna vers M. Delestang et lui demanda d’un ton presque cordial :

— Et vous, monsieur, avez-vous quelque nouvelle à me communiquer ?

— Oui, monsieur, répondit Delestang… nos appareils sont prêts… Ils pourront agir cette nuit même.

— Et vous espérez obtenir quelque effet heureux ? s’exclama le maréchal avec un mélange d’incrédulité et d’ardeur.

— Je l’espère, répliqua Delestang d’une voix grave. Les choses humaines, si bien calculées soient-elles, sont douteuses. Mais j’ai des raisons sérieuses de croire, monsieur, que notre concours ne sera pas inefficace !

Une émotion subtile, l’irrésistible instinct du merveilleux souffla sur ces têtes blanches et grises.