Page:Rosny aîné - La Vague rouge.djvu/456

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gique. Les exhortations, les promesses et les menaces se heurtant à une inertie implacable, ils ne savaient qui frapper, car tous les prolétaires étaient coupables, ni à qui parler, car chacun se dérobait.

La chambre patronale de la maçonnerie se révolta la première. Il parut de hautes affiches, où les patrons informaient le public de la conduite des travailleurs et offraient une augmentation de vingt pour cent sur les prix payés avant la grève de 1906 : les maçons recevraient dix-huit sous l’heure, les limousinants quinze sous, les garçons maçons douze, les tailleurs de pierre dix-neuf, les ravaleurs un franc et trente centimes, les tapissiers un franc, les briqueteurs dix-neuf sous, les garçons briqueteurs onze sous, les tourneurs de treuil treize sous, les bardeurs quatorze sous et demi, les pinceurs quatre-vingt-cinq centimes, les poseurs dix-neuf sous. Le repos hebdomadaire serait donné le dimanche, sauf pour douze dimanches précédés d’un jour de fête dans le cours de la semaine. La journée de travail s’élèverait à dix heures de mars en octobre, à neuf heures en novembre, à huit heures en décembre et janvier. Les artisans s’engageraient à renoncer au sabotage.

Les délégués ouvriers rejetèrent ces conditions. Ils exigèrent en moyenne un sou de plus par heure et la journée de neuf heures, ils refusèrent le travail en commun avec les non syndiqués : ceux-ci opéreraient séparément, dans des chantiers spéciaux.

Après quelques nouveaux pourparlers, les entrepreneurs décrétèrent le lock-out. Les ouvriers l’accueillirent avec flegme et déployèrent, pendant le chômage, la même force d’inertie que sur les chantiers. Ceux que n’atteignait pas le lock-out continuaient le travail, en vertu du mot d’ordre : « Pas de grève ! »