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Page:Rosny aîné - Nymphée - Le Lion, 1909.djvu/116

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compagnons, je sentais mon corps dans ces choses comme un arbre dans une forêt, tandis que toute mon âme se précipitait vers le radeau dont cinq cents mètres à peine nous séparaient. Et cette distance décroissait continuellement.

Or, debout sur mon radeau, entouré de fermes et beaux nageurs, dans le vent, dans l’étincellement du lac, les vagues où chaviraient un monde de lueurs, le chant éperdu de mes Hommes-des-Eaux, c’était une chose vertigineuse. L’espoir et l’impatience se rencontraient dans ma poitrine comme des corps de cavalerie au nœud d’une bataille. Je voyais Sabine, mais elle ne pouvait me voir ; elle avait la tête tournée vers le large. Par quel artifice la contraignaient-ils ? Pourquoi le regard adoré ne venait-il pas au mien ? Vagues préoccupations d’amant, puéril jusqu’au cœur d’un drame.

Arrivés à trois cents mètres, mes nageurs libres s’élancèrent dans la direction du ra-