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Une fête anthropophagique

Pourquoi nous n’étions pas morts, Marandon et moi, je ne l’ai jamais su. Je suppose qu’un grand chef avait tenu à nous avoir vivants. Nous n’étions pas indemnes : Marandon saignait de deux plaies à la tête ; moi, j’avais reçu une flèche à l’épaule, un coup de masse sur l’occiput. Aucune de nos blessures n’était pourtant dangereuse et nous comparûmes devant le conseil des chefs, dans un certain état de faiblesse, assurément, mais fermes sur nos jambes.

La scène était fantasmagorique. On avait rallumé notre propre feu, on en avait fait un bûcher où flambaient des troncs d’arbres, et dont la lueur pâlissait les astres : toute la savane était semée de cadavres et de blessés ; des plaintes sans nombre se répercutaient sur le tertre.

Les chefs étaient réunis au nord du feu. Ces chefs figuraient une douzaine de nègres,