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Page:Rosny aîné - Nymphée - Le Lion, 1909.djvu/224

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Romains vers le cirque ? Ce n’est pas seulement, comme on l’a si souvent prétendu, de la férocité ; il s’y mêle un instinct longtemps indispensable, une admiration et une curiosité de la force, qui n’ont pas pour principe la cruauté, mais plutôt l’amour de la vie, de la vie magnifiée et courageuse. En écoutant rugir mes deux lions, je ne pensais ni au sang ni aux souffrances : je sentais la beauté des grands fauves et que cette beauté n’aurait pu naître sans lutte… Comme je rêvais ainsi, un pas où l’on percevait ensemble la force d’une structure massive et la légèreté de muscles flexibles, commença de s’entendre. Les herbes sifflèrent, le sol craqua ; je vis surgir un lion noir dans un rai de lune. C’était un félin trapu, à l’aise dans sa fourrure sableuse, moins haut que Saïd, avec une rude crinière semée d’ombre. Devant la stature et la face menaçante du rival, il s’arrêta. Tous deux se considérèrent, avec la patience et la ruse de leur race. Le senti-