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Page:Rosny aîné - Nymphée - Le Lion, 1909.djvu/40

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paroles de ma bien-aimée… Je n’étais plus que force adorante, chacun de mes nerfs chargé d’amour… Mais une angoisse me prend. Cette minute est trop belle ! Elle a — sais-je pourquoi ? — d’un coup parachevé ma passion. Elle a été l’éclair qui déchaîne l’orage. Sans doute tout était prêt, l’âme depuis longtemps fleurie, la tendresse profonde et durable. Mais si souvent l’amour, même puissant, se perd dans un long silence, dans un silence qui peut n’être jamais rompu. Une aventure légère — une jolie démarche comme celle de Sabine en ce moment — peut ne laisser plus que l’alternative entre le bonheur et la détresse, le triomphe ou l’amour mortel, sans réponse. Ce matin, je sais que je vais parler, je sais que je vais interroger le destin. De quelles tortures je puis payer cette minute ! Et alors maudite soit la venue de l’aimée. Je murmure :

« Si j’ai pu vous plaire en parlant comme