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DE DENTRECASTEAUX.

1792.
Juillet.
qui vraisemblablement étoit une pirogue de guerre, en contenoit quarante, dont seize étoient des rameurs et le reste des gens armés d’arcs et de flèches : elles vinrent par le travers des deux bâtimens ; mais les insulaises qui les montoient refusèrent d’abord de s’approcher, quelques signes d’amitié et quelques invitations qu’on leur fît ; enfin des baga­telles mises sur une planche que l’on fila des fenêtres de la grande chambre, attirèrent une pirogue auprès de nous ; les trois autres, dans la crainte peut-être de se trouver prises entre les deux bâtimens, s’approchèrent de l’Espérance, qui étoit de l’arrière. Les naturels nous montrèrent des arcs et des flèches qu’ils avoient l’air de vouloir tirer, ce qui ne nous parut pas être d’un bon augure ; mais nous reconnûmes bientôt qu’ils nous les proposoient en échange, et qu’ils nous en désignoient l’usage pour nous engager à les acheter. Ils atta­chèrent de leur plein gré, et sans qu’on le leur demandât, un de leurs arcs à la ligne qui retenoit la planche où l’on avoit mis des couteaux, des clous, de petits miroirs et un morceau d’étamine rouge que nous leur donnions : cette action excita notre générosité, et chacun s’empressa à l’envi de leur faire passer ce qu’il avoit sous la main ; mais alors ils devinrent plus réservés, et quelque chose qu’on leur donnât, ils n’envoyoient plus que des flèches. Les étoffes rouges parurent leur faire plus de plaisir que le fer, les miroirs, et même que les instrumens tranchans. On desiroit avoir un second arc, et on le leur fit connoître, en montrant d’une main celui qu’ils avoient donné, et de l’autre des

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