Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome I, 1779.djvu/168

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Je suis encore si jeune : en est-ce fait de moi ?
Ne reverrai-je plus mon père, mon amante !
Si tu fermois du moins ma paupière mourante,
Ô toi, jeune beauté, pour qui j’aimai le jour !...
Ah ! Mon dernier soupir est un soupir d’amour. »
À ces mots, détournant mes yeux de la lumière,
Je sens un lourd sommeil tomber sur ma paupière ;
Je m’endors : et mes soeurs et mon père éperdus
Se disoient : il s’endort pour ne s’éveiller plus.
Ce même jour pourtant adoucit leurs allarmes.
Le mal, loin de mon lit qu’avoient trempé leurs larmes,
Fuit avec le sommeil : dans mon corps épuisé,
Mon sang plus calme enfin coule moins embrâsé ;
Et la troisième nuit d’un doux repos suivie,
Des portes du tombeau je remonte à la vie.
Combien je fus heureux ! Ciel ! Avec quel transport,
Du naufrage échappé je rentrai dans le port !
Quel charme de sentir ranimer tout son être !
Je crus qu’avec mes sens mon coeur venoit de naître.
Tout me parut nouveau : le soleil à mes yeux
N’avoit