Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/200

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l’orage :
Confions à la roche, aux côteaux sabloneux
(...) mélèse, qui, seul des arbres résineux,
Peu jaloux de sa feuille à l’hyver l’abandonne,
Et le chêne sur-tout, vieux prophète à Dodone.
Qu’il soit de nos forêts le premier ornement :
Sa taille, sa vigueur, son épais vêtement
Sur tous nos végétaux lui méritent l’empire.
Tandis qu’autour de lui tout passe, tout expire,
Lui, déployant toujours des rameaux plus altiers,
Résiste, inébranlable, à des siècles entiers ;
Des dieux toujours vivans noble et frappante image.

Français, respectez donc cet annuel hommage,
Qu’au retour des hyvers, sur un autel sacré,
Vos ancêtres payoient à cet arbre adoré.
Quels chants, quels cris de joie annonçoient cette fête !
Aussi-tôt que des bois le jour doroit le faîte,
Peuples, prêtres et grands marchoient au son du cor
Vers la forêt, que Dreux à ses piés voit encor.
Tableau majestueux ! Nos poëtes antiques,
Les bardes, en trois choeurs, entonnoient des cantiques,
Et noblement vêtus de longs habits flottans,
Conduisoient deux taureaux de blancheur éclatans.
Trois vieillards les suivoient : dans sa main vénérée
L’un portoit un vaisseau rempli d’une eau sacrée ;
L’autre, le pur froment pêtri pour les autels ;
Le dernier, aux regards des coupables mortels,
Présentoit cette main, qui du pouvoir suprême
Dans l’empire des lys est le royal emblême.
Près de leur chef armé d’une serpette d’or,
Les druides sonnoient de la trompe et du cor,
Et le peuple à grands flots fermoit la marche sainte.
Chênes, qui décoriez cette sauvage enceinte,