Page:Rouleau - Légendes canadiennes tome II, 1930.djvu/115

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enchaînés et escortés d’un peloton de huit soldats, faisaient leur entrée dans la chambre du général Murray. S’adressant à mon grand-père, le général lui demanda :

« — Connais-tu bien la route du Saint-Laurent entre Québec et Montréal ?

« — Je la connais comme mon catéchisme.

« — C’est très bien ; si tu conduis ma flotte jusqu’à Montréal, sans accident, je vous donnerai à chacun une forte récompense et la liberté par-dessus le marché. Si vous nous trahissez, c’est la mort.

« — Je vous promets de vous rendre à Montréal dans le milieu du chenal. » Et, ajoutant en français : « Ou à côté. »

« Pierre Léveillé eut toutes les peines du monde pour ne pas éclater de rire en entendant mon grand-père, car celui-ci ignorait les premiers éléments de la science nautique. En fait de navigation, il ne savait que ramer, godiller et conduire une chaloupe de Québec à la rivière Jacques-Cartier.

« Tout de même le marché fut conclu, et les deux prisonniers furent constitués pilotes branchés de la flotte anglaise. On les débarrassa de leurs lourdes chaînes et on les conduisit à la cuisine, où ils firent un excellent repas.

« Après avoir satisfait leur appétit, les deux pilotes improvisés montèrent sur le pont, s’assirent sur un tas d’amarres et se concertèrent aussitôt sur