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Page:Rouquette - Le Grand Silence Blanc, 1920.djvu/48

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LE GRAND SILENCE BLANC

L’âme du café s’éveille, elle monte, lente comme un parfum, et bientôt elle emplit ma chambre. Mes narines battent, mes paupières se ferment à demi ; au travers de mes cils j’aperçois encore un tout petit point lumineux qui troue ma nuit. Le rideau tombe doucement et je glisse au royaume des songes.

Et mon âme légère évolue, elle a quitté son enveloppe de chair, elle tourne en rond dans la chambre, puis elle danse devant la courte flamme. C’est le vol autour des lumières et bientôt la flamme l’attirant, elle s’identifie avec elle… L’âme du feu, pureté première, a pris l’âme de l’homme dépouillé des bassesses charnelles.

La flamme est descendue de la lampe primitive. Elle vagabonde à son tour, de-ci, de-là, là-bas, plus loin, ailleurs, ici… Je veux la saisir, ici… Je veux la saisir, mais un poids m’oppresse qui m’accable et me cloue.

L’étincelle de mes yeux est morte… je suis aveugle et pourtant je vois dans ma nuit intérieure, je vois l’étoile qui conduisit les croyants en marche vers l’adoration des Saintes Images.

Un saut léger, elle a disparu. La nuit. La grande nuit froide et bleue de décembre… Non, là revoilà. Elle anime à nouveau le cœur familier de la lampe. Une lampe ! non, une veilleuse dans le temple… Elle est enclose dans la richesse des métaux, parmi l’or pur et les gemmes précieu-