Page:Rousseau - Œuvres de J B Rousseau, nouvelle édition, Tome I, 1820.djvu/106

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La Mort, déployant ses ailes,
Couvroit d’ombres éternelles
La clarté dont je jouis ;
Et, dans cette nuit funeste,
Je cherchois en vain le reste
De mes jours évanouis.

Grand Dieu, votre main réclame
Les dons que j’en ai reçus ;
Elle vient couper la trame
Des jours qu’elle m’a tissus :
Mon dernier soleil se lève,
Et votre souffle m’enlève
De la terre des vivants,

    aux gémissements de la colombe. Mes yeux se sont lassés de s’élever vers le ciel. Seigneur, je souffre violence, répondez pour moi.

    » Mais que dis-je ? le Seigneur a parlé, le Seigneur l’a voulu.
    Je passerai dans la paix les années qui suivront les jours d’amertume.
    » Je vivrai encore ; la vie me sera rendue. Vous me guérirez,
    ô Seigneur ! vous me donnerez des forces nouvelles.
    » Ah ! la paix succède en mon cœur à la tristesse ; la douleur
    accabloit mon âme, et vous m’avez retiré de l’abîme du néant, et vous avez rejeté mes péchés derrière vous.
    » Le Sépulcre, ô Seigneur ! ne peut chanter vos louanges, non
    plus que la mort ; ceux qui descendent dans la poussière ne publient pas vos grandeurs. C’est l’homme vivant, ô mon Dieu ! qui comme moi célébrera votre nom. Les pères rediront à leurs enfants la vérité de vos promesses. Le Seigneur m’a conservé.
    » Je chanterai dans son Temple l’hymne de la reconnoissance
    pendant tous les jours de ma vie. »