Page:Rousseau - Œuvres de J B Rousseau, nouvelle édition, Tome I, 1820.djvu/107

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Comme la feuille séchée, [1]
Qui, de sa tige arrachée,
Devient le jouet des vents.

Comme un lion plein de rage, [2]
Le mal a brisé mes os ;
Le tombeau m’ouvre un passage
Dans ses lugubres cachots.
Victime foible et tremblante,
A cette image sanglante
Je soupire nuit et jour ;
Et, dans ma crainte mortelle,
Je suis comme l’hirondelle
Sous les griffes du vautour.

Ainsi, de cris et d’alarmes
Mon mal sembloit se nourrir ;

  1. Comme la feuille séchée, etc. Une feuille séchée, dit Le Brun,
    tombe d’elle-même, et n’a pas besoin qu’on l’arrache. Non sans
    doute; mais elle ne tombe pas naturellement ici; elle est flétrie,
    séchée avant le temps, et par conséquent arrachée à sa tige, comme
    Ézéchias est enlevé de la terre des vivants par le souffle du Seigneur.
    De bonne foi, sont-ce là les observations d’un poète sur les vers
    d’un grand poète !
  2. On lit dans la plupart des éditions :
    Comme un tigre impitoyable,
    Le mal a brisé mes os ;
    Et sa rage insatiable
    Ne me laisse aucun repos.
    Mais la dernière leçon est à la fois plus près du texte et plus
    poétique.