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Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t11.djvu/59

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lui donner celui de coquin comme exprimant mieux la bassesse & l’indignité de son ame ; vous voulez que ce reptile ait pris & soutenu pendant quinze volumes le langage intrépide & fier d’un écrivain qui, consacrant sa plume à la vérité, ne quête point les suffrages du public & que le témoignage de son cour met au-dessus des jugemens des hommes ? Vous voulez que parmi tant de si beaux livres modernes, les seuls qui pénètrent jusqu’à mon cœur, qui l’enflamment d’amour pour la vertu, qui l’attendrissent sûr les miseres humaines, soient précisément les jeux d’un détestable fourbe qui se moque de ses lecteurs & ne croit pas un mot de ce qu’il leur dit avec tant de chaleur & de forcé ; tandis que tous les autres, écrits, à ce que vous m’assurez, par de vrais sages dans de si pures intentions, me glacent le cœur, le resserrent, & ne m’inspirent avec des sentimens d’aigreur, de peine, & de haine, que le plus intolérant esprit de parti ? Tenez, Monsieur, s’il n’est pas impossible que tout cela soit, il l’est du moins que jamais je le croye, fut-il mille sois démontre. Encore un coup je ne résiste point à vos preuves, elles m’ont pleinement convaincu : mais ce que je ne crois ni ne croirai de ma vie, c’est que l’Emile & sûr-tout l’article du goût dans le quatrieme livre soit l’ouvrage d’un cour dépravé, que l’Heloise & sûr-tout la lettre sûr la mort de Julie ait été écrite par un scélérat, que celle à M. d’Alembert sûr les spectacles soit la production d’une ame double, que le sommaire du projet de paix perpétuelle soit celle d’un ennemi du genre-humain, que le recueil entier des écrits du même Auteur soit sorti d’une ame hypocrite & d’une mauvaise tète, non du pur zele