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LETTRE II.

À Vore ce 26 Novembre 1771.

MONSIEUR,

Une indisposition de ma fille m’a retenu à la campagne quinze jours de plus qu’à l’ordinaire ; c’est à mes terres que j’ai reçu la lettre que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire je serai dans huit jours à Paris ; à mon arrivée je ferai tenir à M. Lutton la lettre que vous m’adressez pour lui. Je vous remercie bien des notes que vous m’avez envoyées. Vous avez le tact sûr ; c’est dans la note quatrieme & la derniere, que se trouvent les plus fortes objections contre mes principes.

Le plan de l’ouvrage de l’Esprit ne me laissoit pas la liberté de tout dire sur ce sujet ; je m’attendois, lorsque je le donnai au public, qu’on m’attaqueroit sur ces deux points, & j’avois déjà tracé l’esquisse d’un ouvrage dont le plan me permettoit de m’étendre sur ces deux questions ; l’ouvrage est fait, mais je ne pourrois le faire imprimer sans m’exposer à de grandes persécutions. Notre parlement n’est plus composé que de prêtres, & l’inquisition est plus sévere ici qu’en Espagne. Cet ouvrage où je traite bien ou mal une infinité de questions piquantes, ne peut donc paroître qu’à ma mort.

Si vous veniez à Paris, je serois ravi de vous le communiquer, mais comment vous en donner un extrait dans une lettre ? C’est sur une infinité d’observations fines que j’établis mes principes ; la copie de ces observations seroit très-longue ;