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Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t17.djvu/207

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pour crier toujours au paradoxe, pour me reprocher d’être outré : mais lui que je croyois philosophe, & du moins logicien : quoi, c’est ainsi qu’il m’a lu ; c’est ainsi qu’il me juge ! Il ne m’a donc pas entendu ? Si mes principes sont vrais, tout est vrai. S’ils sont faux, tout est faux. Car je n’ai tiré que des conséquences rigoureuses & nécessaires. Que veut-il donc dire ? je n’y comprends rien. Je suis assurément comblé & honoré de ses éloges, mais autant seulement que je peux l’être de ceux d’un homme de mérite qui ne m’entend pas. Du reste, usez de sa lettre comme il vous plaira ; elle ne peut que m’être honorable dans le public. Mais que qu’il dise, il sera toujours clair, entre vous & moi, qu’il ne m’entend point.

Je suis accablé de lettres de Genève. Vous ne sauriez imaginer à la fois la bêtise & la hauteur de ces lettres. Il n’y en a pas une où l’auteur ne se porte pour mon juge, & ne me cite à son tribunal pour lui rendre compte de ma conduit Un M. B..... t, qui m’a envoyé toute sa procédure, prétend que je n’ai point reçu d’affront, & que le Conseil avoir droit de flétrir mon livre, sans commencer par citer l’auteur. Il me dit, au sujet de mon livre brûlé par le bourreau, que l’honneur ne souffre point du fait d’un tiers. Ce qui signifie, ( au moins si ce mot de tiers veut dire ici quelque chose) qu’un homme qui reçoit un soufflet d’un autre ne doit point se tenir pour insulté. J’ai pourtant, parmi tout ce fatras, reçu une lettre qui m’a attendri jusqu’aux larmes ; elle est anonyme, & par une simplicité qui m’a touché encore en me faisant rire, l’auteur a eu soin d’y renfermer le port.