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Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t17.djvu/400

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avec tout le poids, tout le sang - froid, toute la réflexion dont je suis capable ; c’est de retourner en Angleterre & d’y aller finir mes jours dans ma solitude de Wootton. Je crois cette résolution la plus sage que j’aie prise en ma vie, & j’ai pour un des garans de sa solidité, l’horreur qu’il m’a fallu surmonter pour la prendre, & telle qu’en cet instant même je n’y puis penser sans frémir. Je ne puis, Monsieur, vous en dire davantage dans une lettre, mais mon parti est pris, & je m’y sens inébranlable, à proportion de ce qu’il m’en a coûté pour le prendre. Voici une lettre qui s’y rapporte, & à laquelle je vous prie de vouloir bien donner cours. J’écris à M. l’Ambassadeur d’Angleterre, mais je ne sais s’il est à Paris. Vous m’obligeriez de vouloir bien vous en informer, & si vous pouviez même parvenir à savoir s’il a reçu ma lettre, vous seriez une bonne œuvre de m’en donner avis : car tandis que j’attends ici sa réponse, mon passe - port s’écoule, & le temps est précieux. Vous êtes trop clairvoyant pour ne pas sentir combien il m’importe que la résolution que je vous communique demeure secrète, & secrète sans exception : toutefois je n’exige rien de vous que ce que la prudence & votre amitié en exigeront. Si M. l’Ambassadeur d’Angleterre ébruite ce dessein, c’est toute autre chose, & d’ailleurs je ne l’en puis empêcher. En prenant mon parti sur ce point, vous sentez que je l’ai pris sur tout le reste. Je quitterai ce continent comme je quitterois le séjour de la lune. L’autre fois ce n’émit pas la même chose ; j’y laissois des attachemens, j’y croyois laisser des amis. Pardon, Monsieur, mais je parle des anciens. Vous sentez que les nouveaux,