Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t3.djvu/89

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surpris que de la trouver en fonction le jour de mon arrivée. M. de Wolmar en fait un tres grand cas & tous deux lui ont confié le soin de veiller tant sur les enfans que sur celle qui les gouverne. Celle-ci est aussi une villageoise simple & crédule, mais attentive, patiente & docile ; de sorte qu’on n’a rien oublié pour que les vices des villes ne pénétrassent point dans un maison dont les maîtres ne les ont ni ne les souffrent.

Quoique tous les domestiques n’aient qu’une même table, il y a d’ailleurs peu de communication entre les deux sexes ; on regarde ici cet article comme tres important. On n’y est point de l’avis de ces maîtres indifférens à tout, hors à leur intérêt, qui ne veulent qu’être bien servis sans s’embarrasser au surplus de ce que font leurs gens. On pense au contraire que ceux qui ne veulent qu’être bien servis ne sauroient l’être long-tems. Les liaisons trop intimes entre les deux sexes ne produisent jamais que du mal. C’est des conciliabules qui se tiennent chez les femmes de chambre que sortent la plupart des désordres d’un ménage. S’il s’en trouve une qui plaise au maître d’hôtel, il ne manque pas de la séduire aux dépens du maître. L’accord des hommes entre eux ni des femmes entre elles n’est pas assez sûr pour tirer à conséquence. Mais c’est toujours entre hommes & femmes que s’établissent ces secrets monopoles qui ruinent à la longue les familles les plus opulentes. On veille donc à la sagesse & à la modestie des femmes, non seulement par des raisons de bonnes mœurs & d’honnêteté, mais encore par un intérêt tres bien entendu ; car, quoi qu’on en