Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t4.djvu/208

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tissu de leur peau, trop tendre & trop lâche encore, laissant un trop libre passage à la transpiration, les livre par l’extrême chaleur un épuisement inévitable. Aussi remarque-t-on qu’il en meurt plus dans le mois d’août que dans aucun autre mois. D’ailleurs il parait constant, par la comparaison des peuples du Nord & de ceux du Midi, qu’on se rend plu, robuste en supportant l’excès du froid que l’excès de la chaleur. Mais, à mesure que l’enfant grandit & que ses fibres se fortifient, accoutumez-le peu à peu à braver les rayons du soleil ; en allant par degrés, vous l’endurcirez sans danger aux ardeurs de la zone torride.

Locke, au milieu des préceptes mâles & sensés qu’il nous donne, retombe dans des contradictions qu’on n’attendroit pas d’un raisonneur aussi exact. Ce même homme, qui veut que les enfans se baignent l’été dans l’eau glacée, ne veut pas, quand ils sont échauffés, qu’ils boivent frais, ni qu’ils se couchent par terre dans des endroits humides [1]. Mais puisqu’il veut que les souliers des enfans prennent l’eau dans tous les temps, la prendront-ils moins quand l’enfant aura chaud ? & ne peut-on pas lui faire du corps, par rapport aux pieds, les mêmes inductions qu’il fait ses pieds par rapport aux mains, & du corps par rapport au visage ? Si vous voulez, lui dirai-je, que l’homme soit tout visage,

  1. Comme si les petits paysans choisissaient la terre bien sèche pour s’y asseoir ou pour s’y coucher, & qu’on eût jamais oui dire que l’humidité de la terre eût fait du mal à pas un d’eux. À écouter la-dessus les médecins, on croiroit les sauvages tout perclus de rhumatismes.