Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t6.djvu/230

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deux Livres si séduisans, que le pur Evangile est absurde en lui-même & pernicieux à la société. Le Conseil étoit donc obligé de jetter un regard sur celui que tant de présomptions si véhémentes accusoient de cette entreprise. "

Voyez d’abord que ces Messieurs sont agréables ! Il leur semblé entrevoir de loin un peu de pratique & de machination. Sur ce petit semblant éloigné d’une petite manœuvre, ils jettent un regard sur celui qu’ils en présument l’Auteur ; & ce regard est un décret de prise de corps.

Il est vrai que le même Auteur s’égaye à prouver ensuite que c’est par une pure bonté pour moi qu’ils m’ont décrété. Le Conseil, dit-il, pouvoit ajourner personnellement M. Rousseau, il pouvoit l’assigner pour être oui, il pouvoit le décréter… De ces trois partis, le dernier étoit incomparablement le plus doux… ce n’étoit au fond qu’un avertissement de ne pas revenir, s’il ne vouloit pas s’exposer à une procédure ; ou, s’il vouloit s’y exposer, de bien préparer ses défenses. *

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Ainsi plaisantoit, dit Brantôme, l’exécuteur de l’infortuné Dom Carlos, Infant d’Espagne. Comme le Prince crioit & vouloit se débattre : Paix, Monseigneur, lui disoit-il en l’étranglant, tout ce qu’on en fait n’est que pour votre bien.

Mais quelles sont donc ces pratiques & machinations dont on m’accuse ? Pratiquer, si j’entends ma Langue, c’est se ménager des intelligences secretes ; machiner, c’est faire de sourdes menées, c’est faire ce que certaines gens font contre le Christianise & contre moi. Mais je ne conçois rien de moins secret, rien de moins caché dans le monde, que de