Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t8.djvu/315

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Mais comment faut-il procéder pour déterminer ce son fondamental de la maniere la plus avantageuse qu’il est possible ; c’est d’abord une question qui mérite fort d’être examinée ? On voit déjà qu’il n’est aucun son dans la nature qui contienne quelque propriété particuliere & connue, par laquelle on puisse le distinguer, toutes les fois qu’on l’entendra. Vous ne sauriez décider sur un son unique, que ce fait un ut plutôt qu’un la, ou un re, & tant que vous l’entendrez seul vous n’y pouvez rien appercevoir qui vous doive engager à lui attribuer un nom plutôt qu’un autre. C’est ce qu’avoit déjà remarque Monsieur de Mairan. Il n’y a, dit-il, dans la nature, ni ut ni sol qui soit quinte ou quarte par soi-même, parce que ut, sol, ou re n’existent qu’hypothétiquement selon le son fondamental que l’on a adopté. La sensation de chacun des tons n’a rien en soi de propre à la place qu’il tient dans l’étendue du clavier, rien qui le distingue des autres pris séparément. Le re de l’Opéra pourroit être l’ut de Chapelle, ou au contraire : la même vitesse, la même fréquence de vibrations qui constitue l’un, pourra servir quand on voudra à constituer l’autre ; ils ne différent dans le sentiment qu’en qualité de plus haut ou de plus bas, comme huit vibrations, par exemple, différent de neuf, & non pas d’une différence spécifique de sensation.

Voilà donc tous les sons imaginables réduits à la seule faculté d’exciter des sensations par les vibrations qui les produisent, & la propriété spécifique de chacun d’eux réduite au nombre particulier de ces vibrations, pendant un tems déterminé : or, comme il est impossible de compter ces vibrations,