Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t9.djvu/83

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Divertissemens ou Fêtes. Ce sont des suites de Danses qui se succedent sans sujet, ni liaison entre elles, ni avec l’action principale, & où les meilleurs Danseurs ne savent vous dire autre chose sinon qu’ils dansent bien. Cette Ordonnance peu théâtrale suffit pour un Bal où chaque Acteur à rempli son objet lorsqu’il s’est amusé lui-même, & où l’intérêt que le Spectateur prend aux personnes le dispense d’en donner à la chose ; mais ce défaut de sujet & de liaison ne doit jamais être souffert sur la Scene, pas même dans la représentation d’un Bal, où le tout doit être lié par quelque action secrete qui soutienne l’attention & donne de l’intérêt au Spectateur. Cette adresse d’Auteur n’est pas sans exemple, même à l’Opéra François, & l’on en peut voir un très-agréable dans les Fêtes Vénitiennes, Acte du Bal.

En général, toute Danse qui ne peint rien qu’elle même, & tout Ballet qui n’est qu’un Bal, doivent être bannis du Théâtre lyrique. En effet, l’action de la Scene est toujours la représentation d’une autre action, & ce qu’on y voit n’est que l’image de ce qu’on y suppose ; de sorte que ce ne doit jamais être un tel ou un tel Danseur qui se présente à vous, mais le personnage dont il est revêtu. Ainsi, quoique la Danse de Société puisse ne rien représenter qu’elle-même, la Danse théâtrale doit nécessairement être l’imitation de quelque autre chose, de même que l’Acteur chantant représente un homme qui parle, & la décoration d’autres lieux que ceux qu’elle occupe.

La pire sorte de Ballets est celle qui roule sur des sujets allégoriques de où par conséquent il n’y a qu’imitation d’imitation.