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CHAPITRE III

L’Influence du Contrat social


« Nous n’avons pas vu de notre temps, et le monde n’a vu qu’une ou deux fois dans tout le cours des temps historiques, des travaux littéraires exercer une aussi prodigieuse influence sur l’esprit des hommes de tout caractère et de tome nuance intellectuelle que ceux que publia Rousseau de 1749 à 1762. »
(H. Sumner Maine, l’Ancien Droit, trad. franç., p. 83).


Il est, je pense, impossible de déterminer exactement l’influence exercée par le Contrat social : en tout cas, pour le tenter sérieusement, il faudrait tout un livre. Auguste Comte dit qu’il y a eu une époque de l’histoire où le Contrat a suscité plus d’enthousiasme et de loi « que n’en obtinrent jamais la Bible et le Coran[1] ». Carlyle l’appelle le « cinquième évangile » ou « l’évangile selon Jean-Jacques[2] ». Le livre de Rousseau, par son abstraction et sa généralité, se prêtait à toutes les déductions et pouvait être appliqué à tous les problèmes politiques ; la complexité même de la thèse fondamentale, qui prétendait concilier l’autorité et la liberté, facilitait les interprétations partielles et exclusives ; les admirables formules, concises, nettes et pleines, qu’on y

  1. A. Comte, Politique positive, t. III, ch. vii.
  2. Carlyle, The french révolution, t. II, ch. vii, p. 44.