Page:Rousseau - Du Contrat social éd. Beaulavon 1903.djvu/90

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avait condamné, mais que rendaient absolument nécessaire l’étendue du pays, le nombre de la population et le souci de maintenir l’unité nationale. Mais du moins on voulut d’abord que l’élection des représentants fût directe, « parce que le peuplé souverain doit le moins possible aliéner sa souveraineté (*)», et ensuite que la future constitution fût soumise à la ratification directe du peuple ( 2 ); beaucoup de sociétés et de sections le réclamaient en août 1792, et Danton fit voter à l’unanimité, dès la réunion de la Convention, ce principe : « Il ne peut y avoir de constitution que celle qui est acceptée par le peuple ( 3 ). »

Aussi les deux projets de constitution, le projet dit girondin préparé par Condorcet aussi bien et même plus encore que le projet montagnard d’Hérault de Séchelles, s’efforcent d’appliquer à un grand peuple quelques-uns des principes démocratiques formulés par Rousseau ( 4 ). La souveraineté du peuple doit s’exercer directement par les assemblées primaires, et le rôle des représentants est en somme de préparer seulement les lois : le peuple en doit décider définitivement. Et les deux projets sont également amenés à distinguer les lois dont le peuple reste l’auteur direct, et les décrets qui rentrent dans les attributions de l’assemblée nationale : distinction chère à Rousseau, qui établissait entre la loi, toujours générale par son objet, et les décrets particuliers une différence profonde ( 5 ) ; ni l’un ni l’autre des deux projets n’observe rigoureusement la distinction établie par Rousseau entre la loi et le décret, mais il est manifeste qu’ils s’en inspirent. Enfin, dans son projet, Hérault de Séchelles avait proposé linsti-

(*) Pétition du Club des Jacobins, du 13 août 1792 (Aulard, II, 11, § 12; p. 257).

(-) Cf. C. s. Il, vu.

( :î ) Séance du 21 septembre 1792 (Aulard, ibid., p. 258).

4 ) Aulard, II, iv. — Louis Blanc, X, 1.

( 5 ) Cf. C. s. II, iv et vi.