Page:Rousseau - Du contrat social éd. Dreyfus-Brisac.djvu/122

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

} LIVRE ll. — CHAP. VI. 65 1 l’Etat ou hors de l’Etat, S’il est hors de l’Etat, une volonté qui lui est étrangére n’est point générale par rapport a lui; et si cet objet est dans l’Etat, il en fait partie : alors il se forme entre le tout et sa partie une relation qui en fait deux étres séparés, dont la partie est l’un, et le tout, moins cette méme partie, est l’autre. Mais le tout moins une partie ( n’est point le tout; et tant que ce rapport subsiste, il n’y a plus de tout, mais deux parties inégales : d’oi1 il suit que la volonté de l’une n’est point non plus générale par rapport a l’autre. Mais quand tout le peuple statue sur tout le peuple, il ne considére que lui·méme; et s’il se forme alors un rap- port, c’est de l’objet entier sous un point de vue a l’objet entier sous un autre point de vue, sans aucune division du tout. Alors la matiere sur laquelle on statue est générale comme la volonté qui statue. C'est cet acte que j’appelle une loi. ‘ Quand je dis que l’objct des lois est toujours général, j’entends que la loi considére les sujets en corps et les actions comme abstraites, jamais un homme comme indi- vidu ni une action particuliére (1). Ainsi la loi peut bien statuer qu’il y aura des privileges, mais elle n’en peut donner nommément a personne; la loi peut faire plusieurs classes de citoyens, assigner meme les qualités qui donne- ront droit a ces classes, mais elle ne peut nommer tels et tels pour y étre admis; elle peut établir un gouvernement royal et une succession héréditaire, mais elle ne peut élire un roi, ni nommer une famille royale : en un mot, toute (1) Locxs, Gouvernement civil, chap. x, De Pétenduc du pouvoir le'gis· latif. — Il y aura les memes réglcments pour le riche et pour le pauvre, pour le favori et le courtisan, et pour le bourgeois et le laboureur. Buxuxunour, Principes du Droit naturel, tome I, chap. x, De la jin deslois, de leur: caractéres et de leurs diférences. —‘1• Si le législateur peut abroger entiérement une loi, h plus forte raison peut·il en suspendre l’cflet par rapport a telle ou telle personne; 2¤ Mais on doit avouer aussi qu’il n’y a que le législateur lui-meme qui ait ce pouvoir. 5