Page:Rousseau - Du contrat social éd. Dreyfus-Brisac.djvu/133

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76 DU CONTRAT SOCIAL. décisions dans la bouche des immortels, pour entrainer par l’autorité divine ceux que ne pourrait ébranler la prudence humaine (a). Mais il n’appartient pas a tout homme de faire parler les dieux, ni d’en étre cru quand il s’annonce pour étre leur interpréte. La grande ame du législateur est le seul miracle qui doit prouver sa mission. Tout homme peut graver des tables de pierre, ou acheter un oracle, ou feindre un secret commerce avec quelque divinité, ou dresser un oiseau pour lui parler a l’oreille, ou trouver d’autres moyens grossiers d’en imposer au peuple. Celui qui ne saura que cela pourra meme assembler par hasard une troupe d’in- senses; mais il ne fondera jamais un empire, et son extra- vagant ouvrage périra bientot avec lui. De vains prestiges forment un lien passager; il n’y a que la sagesse qui le rende durable. La loi judaique, toujours subsistante, celle de l’enfant d’Ismaél qui, depuis dix siécles, régit la moitié du monde, annoncent encore aujourd’hui les grands hommes qui les ont dictées; et tandis que l’orgueilleuse philosophic ou l’aveugle esprit de parti ne voit en eux que d’heureux imposteurs, le vrai politique admire dans leurs institutions ce grand et puissant génie qui préside aux éta- blissements durables. Il ne faut pas, de tout ceci, conclure avec Warburton que la politique et la religion aient parmi nous un objet commun, mais que, dans l’origine des nations, l’une sert d’instrument a l’autre (t). (a) it E veramente, dit Machiavel, mai non fit alcuno ordinatore di leggi a straordinarie in un popolo, che non ricorresse a Dio, perche altrimenti it non sarebbero accettate; perche sono molti boni conosciuti da uno pru- tt dentc, i quali non hanno in se ragioni evidenti da potergli persuadere ad a altrui.» (Discorsi sopra Tito Livio, lib. I. cap. xr.) (Note du Contrat social, édition de 1762.) Généralement tous ceux qui ont amené en un pays secte et loi extraordinaire, ils ont toujours usé de cette convention divine pour rendre leur cas plus vénérablc et authentique,car beaucoup de bonnes choses qu’un homme sage connoist estre tellcs, toutcs fois ne les S§8.�I'OII-ll SOUVCDC dOI'DCI' ¢IlICDdI‘C 8.1X autres, pa? I‘RlSODS éVld¢’1I¢S (traduction de Gohory. Paris, Robert le Mangnier, t57t). (t) Wsnnuaros, Dissertation 14. — Les violences mutuelles, dont les