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Page:Rousseau - Du contrat social éd. Dreyfus-Brisac.djvu/182

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l LIVRE III. — CHAP. VI. u5 et dépositaire dans I’Etat de la puissance executive. Nous avons maintenant 21 considérer cette puissance réunie entre les mains d’une personne naturelle, d’un homme réel, qui seul ait droit d’en disposer selon les lois. C’est ce qu’on appelle un monarque ou un roi. Tout au contraire des autres administrations ou un etre collectif représente un individu, dans celle·ci un individu . représente un étre collectif; en sorte que l‘unité morale qui constitue le prince est en meme temps une unité phy- sique, dans laquelle toutes les facultés que la loi réunit dans l’autre avec tant d’eil`ort se trouvent naturellement réunies. Ainsi la volonté du peuple, et la volonté du prince, et la force publique de l’Etat, et la force particuliere du gouver- nement, tout répond au meme mobile, tous les ressorts de la machine sont dans la meme main, tout marche au meme but; il n’y a point de mouvements opposés qui s’entre- détruisent, et l’on ne peut imaginer aucune sorte de consti- tution dans laquelle un moindre effort produise une action plus considérable(1). Archimede,assis tranquillement sur le rivage et tirant sans peine a Hot un grand vaisseau, me représente un monarque habile, gouvernant de son cabinet ses vastes Etats, et faisant tout mouvoir en paraissant im- mobile (2). (1) Moxrzsquxxu, Esprit des Lois, liv. V, chap. x. - Le gouvernement monarchique a un grand avantage sur le républicain; les affaires étant menées par un seul, il y a plus de promptitude dans l’exécution. (2) Polysynodie. -· Le dernier des hommes tiendra paisiblement ct com- modément lc sceptre de l`univers; plongé dans d`insipides voluptés, il pro- ménera, s`il le vcut, de fetc en fete son ignorance et son ennui. Cependant, on le traitera dc conquérant, d’invincible, de roi des rois, de monarque auguste, de monarque du monde et de majesté sacrée. Oublié sur le trone, nul aux yeux de ses voisins et meme a ceux de ses sujcts, encensé de tous sans etre obéi de personnc, faible instrument de la tyrannie des courtisans et de Ycsclavage du peuple, on lui dira qu’il régne, et il croira régner. Voila le tableau général du gouvernement de toute monarchic trop étendue: qui vcut soutenir le monde et n’a pas les épaules d’Hercule, doit s’attendre d’etre écrasé. R. Nouvelle Héloise, partie VI, Iettre 8. — Tout prince qui aspire au l