Aller au contenu

Page:Rousseau - Du contrat social éd. Dreyfus-Brisac.djvu/198

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LIVRE III. -— CHAP. VII. 141 difference que tantot le grand nombre dépend du petit, et tantot le petit du grand (1). Quelquefois il y a partage égal, soit quand les parties constitutives sont dans une dépendance mutuelle, comme Pierre n’aurait pas imité ce philosophe, trop iniuste ennemi de la monar- chie, qui,chargé dans un dictionnaire de morale de l’article Citoyen,voulait le réduire a ces deux mots : Citoyen, voyez République. (1) A111s·ro·rz, Politique, liv. VI, chap. 111. — Ce qui multiplie les formes des constitutions c’est précisément la multiplicité des éléments qui entrent touiours dans l’Etat... Or ces éléments de l'Etat peuvent prendre part au pouvoir soit dans leur universalité, soit en nombre plus ou moins grand. Il s’ensuit évidemment que les especes de constitution doivent etre de toute nécessité aussi diverses que ces parties memes le sont entre elles suivant leurs espeees ditférentes. La constitution n’est pas autre chose que la répartition réguliere du pouvoir qui se divise touiours entre les associés soit en raison de leur importance particuliere, soit d’apres un certain prin- cipe d’égalité commune, c’est-a-dire qu’on peut faire une part aux riches _ et une autre aux pauvres, ou leur donner des droits communs. Aussi les constitutions seront nécessairement aussi nombreuses que le sont les com- binaisons de supériorité et de dilférence entre les parties de l’Etat... Pour nous, il n’y a que deux constitutions ou meme une seule constitu- tion bien combinée dont toutes les autres dérivent et dégénérent. Si tous les modes en musique dérivent d’un mode parfait d’ha1·monie, toutes les constitutions dérivent de la constitution modele; oligarchique, si le pouvoir y est concentré et plus despotique; démocratique, si les ressorts en sont plus relachés et plus doux. C’est une grave erreur, quoique fort commune, de faire reposer exclusi- vement la démocratie sur la souveraineté du nombre, car dans les oligarchies aussi, et l’on peut meme dire partout, la majorité est toujours souveraine. D’un autre cété l’0ligarchie ne consiste pas davantage dans la souveraineté de la minorité... ...ll n’y a de démocratie réelle que la ou les hommes libres, mais psuvres, forment Ia majorité et sont souverains. Il n’y a d’oligarchie que la ou les riches et les nobles en petit nombre possedent la souveraineté". ...Les seules choses qu’on ne puisse cumuler sont la pauvreté et la richesse, et voila pourquoi riches et pauvres semblent les deux parties les plus distinctes de l’Etat. D’autre part, comme le plus ordinairement ceux·ci sont en maiorité,ceux-la en minorité, on les regarde comme deux éléments politiques parfaitement opposés. Par suite la prédominance des uns et des autres fait la difference des constitutions qui semblent en conséquence etre bornées a deux seulement, la démocratie et Poligarchie. Fxténémc II, Anti-Machiavel, chap. x11. — Cette diiférence des gouver- nements est tres sensible, et elle est iniinie lorsqu'on veut descendre jusque . dans les détails; et de meme que les médecins ne possedent aucun secret qui convienne a toutes les maladies et a toutes les complexions,de meme les politiques ne sauraient-ils prescrire des regles générales, do11t l'application soit a l’usage de toutes les formes de gouvernements.