Aller au contenu

Page:Rousseau - Du contrat social éd. Dreyfus-Brisac.djvu/350

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

APPENDICE I. 283 prendre pour maintenir partout l’autorité générale, A laquelle tant d’officiers éloignés veulent touiours se soustraire `ou en imposer, absorbe tous les soins publics, il n’en reste plus pour le bonheur du peuple; A peine en reste·t·il pour sa défense au besoin, et c’est ainsi qu’un Etat trop grand pour sa constitution périt toujours écrasé sous son propre poids. D’un BUIIC coté l’Etat doit se donner une certaine base pour avoir de la solidité et résister aux secousses qu’il ne manquera pas d’é- prouver et aux efforts qu’il sera contraint de soutenir; car tous les peuples ont une espece de force centrifuge par laquelle ils agissent continuellement les uns contre les autres et tendent A s’agrandir aux dépens de leurs voisins comme les tourbillons de Descartes. Ainsi les faibles risquent d’étre bientot engloutis, et l’on ne peut guere se conserver qu’en se mettant avec tous en une sorte d’équilibre qui rende la compression A peu pres égale. On voit par lA qu’il y a des raisons de s’étendre et des raisons de se resserrer, et ce n’est pas le moindre talent du politique de trouver entre les unes et les autres la proportion la plus avantageuse A la conservation de l’Etat. On peut dire en général que les premieres étant purement extérieures et relatives doivent toujours étre subor- données aux autres qui sont intérieures et absolues; car une forte et saine constitution est la premiere chose qu’il faut rechercher et l’on doit plus compter sur la vigueur qui nait d’un bon gouvernement que sur les ressources que fournit un grand territoire. Au reste, on a vu des Etats tellement constitués que la nécessité des conquétes était dans leur constitution meme, et que, pour se maintenir, ils étaient forcés de s’agrandir sans cesse. Peut-etre se félicitaient-ils beaucoup de cette heureuse nécessité, qui leur mon- trait pourtant, avec le terme de leur grandeur, l’inévitable moment de leur chute.] (a) [Pour que l’Etat puisse étre bien gouverné il faudrait que sa gran- deur ou, pour mieux dire, son étendue fut mesurée aux facultés de ceux qui le gouvernent, nk et Pimpossibilité que de grands hommes se succedent sans cesse dans le gouvernement veut qu’on se regle sur la portée commune. VoilA ce qui fait que les nations, agrandies sous des chefs illustres, dépérissent nécessairement entre les mains des imbéciles qui ne manquent pas de leur succéder *, et que pour peu qu’un Etat soit grand, le prince est presque toujours trop fpetit. Quand, au contraire, il arrive que l’Etat est trop petit pour son chef, ce qui est tres rare, il est encore mal gouverné; parce que le chef, suivant tou- jours la grandeur de ses vues et les projets de 1’ambition, oublie les intéréts du peuple et ne le rend pas moins malheureux par l’abus (a) Le passage entre crochets A passé dans le Contra! social, liv. Ill, chap. vt, A part q�¢lqll¢8 {DOI! qllé DODS mIl'q�I18 CDITC de! Cl'0lX CI dillllltllfs SC YCITOUVEDI pI'¢$ql¢ textuellement ailleurs.