Page:Rousseau - Du contrat social éd. Dreyfus-Brisac.djvu/456

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

APPENDICE VI. 383 nous rechercherons la mesure de cette autorité, comment elle est fondée dans la nature, si elle a d’autre raison que l’utilité de l`enfant, sa faiblcsse, et l’amour naturel que le pére a pour lui : si donc la faiblesse de 1’enfant venait A cesser, et sa raison A miirir, il ne devient pas seul juge naturel de ce qui convient A sa conservation, par con- séquent son propre maitre et indépendant de tout autre homme, méme de son pére; car il est encore plus sur que le iils s’aime lui- méme, qu’il n’est siir que le pére aime le {ils : Si, le pére mort, les enfants sont tenus d’obéir A leur ainé, ou A quelque autre qui n’aura pas pour eux l’attachement naturel d’un pére; et si de race en race, il y aura toujours un chef unique, auquel toute la famille soit tenue d’obéir. Auquel cas on chercherait comment l’autorité pourrait jamais étre partagée, et de quel droit il y aurait sur la terre entiere plus d’un chef qui gouvernat le genre humain. Supposé que les peuples se fussent formés par choix, nous distin- guerons alors le droit du fait; et nous demanderons si, s’étant ainsi soumis A leurs fréres, oncles, ou parents, non qu’ils y fussent obligés, mais parce qu’ils l’ont bien voulu, cette sorte de société ne rentre pas toujours dans l’association libre et volontaire, Passant ensuite au droit d`esclavage, nous examinerons si un homme peut légitimement s’aliéner A un autre, sans restriction, sans réserve, sans aucune espéce de condition; c’est-A-dire s’il peut renoncer A sa personne, A sa vie, A sa raison, A son moi, A toute moralité dans ses actions, et cesser en un mot d’exister avant sa mort, malgré la nature qui le charge immédiatement de sa propre conservation, et malgré sa conscience et sa raison qui lui prescrivent ce qu’il doit faire et ce dont il doit s’abstenir. Que s’il y a quelque réserve, quelque restriction dans l’acte d’es- clavage, nous discuterons si cet acte ne devient pas alors un vrai contrat, dans lequel chacun des deux contractants, n’ayant point en cette qualité de supérieur commun (1), restent leurs propres juges quant au conditions du contrat, par conséquent libres chacun dans cette partie, et maitres de le rompre sitot qu’ils s’estiment lésés. Que si donc un esclave ne peut s’aliéner sans réserve A son maitre, comment un peuple peut·il s’aliéner sans réserve A son chef? et si l’esclave reste juge de l’observation du contrat par son maitre, com- ment le peuple ne restera-t-il pas juge de l’observation du contrat par son chef? Forcés de revenir ainsi sur nos pas, et considérant le sens de ce mot collectif de peuple, nous chercherons si pour l’établir il ne faut pas un contrat, au moins tacite, antérieur A celui que nous supposons. T Puisque avant de s’élire un roi le peuple est un peuple, qu’est-ce I (I) S•ll8 CII ¤V8lCHI lll], CC Sllpéfléllf COH'lI’’ll1I] IIC $¢l'3lI QUITE QUE le S0l1V¢I'llD$ CZ i alors le droit d'esclavaqe, fondé sur le droit de souveraineté, n’en serait pas le prin- I I I I