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La Monongahéla

on ne savait trop quels éléments fermentaient dans le chaos brûlant de cette riche nature abandonnée à elle-même comme en pleine forêt.

Par la perte de sa mère, morte très-jeune, elle avait été laissée aux seuls soins de sa vieille nourrice Inès, qui l’aimait comme son enfant.

Quant à son père, quoique l’affection qu’il ressentait pour sa fille fut très-vive, vieux militaire ne rêvant que compagnes et combats de taureaux, ne s’était-il étudier qu’à céder à tous ses caprices.

On comprend qu’une pareille éducation n’était pas propre à former à la vertu une jeune fille belle et ardente. Cependant, il est des natures tellement heureuses, qu’elles restent pures et bonnes, même au milieu des plus grands dangers.

Telle était Dona Maria. Son cœur et son esprit étaient restés vierges de toutes souillures, ne contenant qu’une tendre affection pour son père et un vif attachement pour sa vieille nourrice Inès.

À son entrée dans la loge, tous les regards s’étaient tournés vers la jeune fille. Mais aucun des spectateurs ne l’avait plus remarquée qu’un jeune homme placé à quelques pas seulement de l’arène, et qui était lui-même le point de mire de bien des jolis yeux.

Et de fait, ce jeune homme, qui portait un riche costume de cour, ayant au côté une légère rapière à la poignée de laquelle étincelait de mille feux un