Page:Roussel - Chiquenaude, 1900.djvu/11

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et il se battait quand même. Infailliblement son épée se brisait sur le complet magique du diable qui le tuait ensuite avec un éclat de rire.

La lorgnette aux yeux, je suivais attentivement de ma baignoire les péripéties de l’action, et jusqu’au milieu du troisième acte Méphisto avait toujours été vainqueur, et mes strophes n’avaient pas eu à mentir. Mais ici tout allait changer.

Le héros du drame était un certain Panache, grand coureur de filles et grand spadassin. Il n’hésitait pas à occire un brave gentilhomme pour lui voler sa bourse, mais il ne le frappait pas en traître, par derrière ; il l’attaquait bien en face et lui laissait le temps de tirer l’épée pour se défendre. Cette délicatesse, jointe à une galanterie sans bornes avec les femmes, lui faisait mériter le surnom qui servait de titre à la féerie.

Panache avait pour marraine une vieille fée, nommée Chiquenaude, méchante comme la peste, mais qui adorait son filleul. À l’aide d’un miroir magique elle suivait tous ses faits et gestes et se tenait prête à lui porter secours à l’heure du danger.

Or, certain soir, Méphisto, passant devant la