Page:Roussel - Chiquenaude, 1900.djvu/16

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chacun, à tour de rôle, faisait un point dans l’étoffe.

D’autres fois Crinière soutenait Fusée par la taille. Celle-ci, ne posant qu’une seule pointe à terre, levait la jambe en l’air et cousait nonchalamment pendant que l’orchestre nuançait une lente mélodie.

De temps à autre le défilé général recommençait.

À la fin, Chiquenaude, satisfaite des génies, les congédiait en étendant les bras.

Aussitôt Crinière saisissait Fusée par la taille et l’emmenait tendrement. Les autres disparaissaient par où ils étaient venus et les enfants-bobines se mêlaient à la déroute.

L’obscurité se faisait de nouveau et Chiquenaude restait seule.

Elle regardait avec une joie méchante le costume rouge remis à l’endroit maintenant.

« Étoffe fée tu as vécu, murmurait-elle ; si avant une heure tu ne tombes pas en ruines, je ne veux plus m’appeler Chiquenaude. »

Regagnant sans bruit l’alcôve, elle ouvrait une troisième fois les rideaux.

« Ils se sont endormis ; » ricanait-elle.