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Kurus ; Kṛṣṇa, Kṛṣṇa, ô grand Yogin, Âme universelle, Origine du monde, protège-moi, ta suppliante, qui suis tombée au milieu des Kurus ! »

Kṛṣṇa qui est à la fois Viṣṇu, Hari et Nara, étant ainsi invoqué par Yâjnasenî[1], descendant aussitôt de sa demeure céleste[2] accourut à son aide, invisible à tous. Au fur et à mesure que Duḥçâsana dépouillait la jeune femme de son vêtement, elle apparaissait couverte d’un autre ; il lui en arracha ainsi successivement des centaines, à l’étonnement et à l’indignation de tous[3].

Bhîma furieux de voir que Duḥçâsana continuait ses brutalités, s’écria, en présence des princes :

« Ô maîtres de la terre, si je n’accomplis point ce que je vais dire, je consens à ne jamais obtenir le séjour de mes ancêtres. Ce misérable, ce pervers, le rebut des Bhâratas, je lui ouvrirai la poitrine sur le champ de bataille, et je boirai son sang »[4].

Ce ne fut de toutes parts qu’un cri de réprobation à l’adresse de l’insulteur de Draupadî.

Vidura se fit l’interprète de l’indignation générale et parla au nom de la morale outragée dans la personne de l’infortunée princesse[5]. Toutefois personne n’osa s’interposer entre elle et son bourreau. Nul ne tenta, non plus, de résoudre la question posée par Draupadî, malgré ses instances et ses lamentations :

« … Moi qui, dans ma demeure, n’avais jamais été vue par le Vent, ni le Soleil, me voilà aujourd’hui exposée aux regards de la foule ! Autrefois, dans notre demeure,

  1. Surnom de Draupadî.
  2. Le Vaikuṇṭha.
  3. Id. 41 et seq.
  4. LXVIII, 52 et seq.
  5. Id. 59 et seq.